Proposition d’un modèle belge priorisant la santé dans la prise en charge des infractions liées aux drogues

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Proposition d’un modèle belge priorisant la santé dans la prise en charge des infractions liées aux drogues

8 juin 2023

Afin d’assurer une meilleure efficacité de la politique drogues et des budgets investis à cet effet, il semble nécessaire de redéfinir les objectifs et les moyens d’une telle politique. Vu l’inefficacité de la répression à juguler l’usage de drogues en général, il conviendrait de déplacer l’objectif vers une maîtrise voire une diminution de l’usage problématique plutôt que de rechercher une disparition de tout usage, quel qu’il soit. Cela impliquerait donc d’opérer un discernement entre personnes consommatrices qui sont à risque d’usage problématique ou qui présentent déjà un tel usage, et celles pour qui ce n’est pas le cas. Plutôt que de réprimer les personnes qui rencontrent des problèmes sans toutefois forcément en poser à autrui, il serait préférable, selon les cas, soit de les informer des réflexes de prévention et/ou de réduction des risques ainsi que des ressources proches d’accompagnement et de soins, soit de leur proposer de manière plus définie une prise en charge en fonction de leurs besoins.

Une telle approche permet d’une part d’évaluer les usages de drogues existants, tant individuellement que sur le plan sociétal, de détecter plus tôt qu’actuellement les personnes présentant un risque ou une tendance à l’usage problématique, et de faire entrer ces personnes en contact avec les services adéquats de manière plus précoce. Elle permet également de mettre en application une volonté politique affichée depuis longtemps et encore présente dans l’actuel accord de gouvernement, sans qu’elle ait jamais réellement été mise en pratique: réprimer lorsque c’est nécessaire, mais garder la répression et la sanction comme un dernier recours, lorsque toutes les autres approches ont échoué.

Concrètement, on pourrait mettre en place un parcours qui présente plusieurs options lorsque des services de police ou autres interpellent une personne en flagrant délit de détention ou de consommation de drogues. Dans un contexte où le marché du cannabis serait réglementé, le constat de détention ou de consommation (dans les lieux autorisés) de cannabis se solderait par des conseils de prévention et de réduction des risques au sujet du cannabis, notamment au sujet des dangers de la conduite sous influence, mais sans qu’il y ait saisie de la substance détenue, à condition cependant que la quantité détenue reste sous un seuil prédéfini.

En cas de dépassement de ce seuil, ou en cas d’interpellation en flagrant délit de détention de substances non réglementées et donc illicites, les substances font l’objet d’une saisie, et les services de police opèrent un tri entre deux filières: en fonction des quantités saisies (supérieures ou inférieures aux seuils définis pour chaque substance) et de la présence ou non de circonstances aggravantes, ils orientent la personne vers la filière social-santé ou vers la filière judiciaire. D’après les derniers chiffres pour la Belgique, environs 10.000 faits de détention (hors cannabis) sont enregistrés par an (Tableau de bord 2021 Bruxelles, Eurotox, p. 221).