La menace du Projet de loi C-2 pour les sites de consommation supervisée - et pour la santé des communautés

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La menace du Projet de loi C-2 pour les sites de consommation supervisée - et pour la santé des communautés

5 novembre 2014

En septembre 2011, la Cour suprême du Canada a fait une déclaration musclée concernant l'importance de la réduction des méfaits ainsi que les vies des personnes qui ont besoin de services de réduction des méfaits, lorsqu'elle a permis qu'Insite - le site salvateur de consommation supervisée à Vancouver - poursuive ses opérations sans risque de poursuites au criminel. La Cour a reconnu que le fait de permettre qu'une interdiction générale de possession de drogues s'applique même dans un tel établissement serait néfaste à la santé publique et exposerait des personnes à un risque accru de préjudices par ailleurs évitables, y compris de décès par surdose et d'infection par le VIH et le virus de l'hépatite C (VHC). La Cour a conclu que la décision de la ministre de la Santé de refuser une exemption à Insite était « arbitraire » parce qu'elle ne comporterait pas de bienfaits pour la santé publique, ni pour la sécurité publique. De plus, les préjudices d'un refus d'offrir aux personnes un accès sécuritaire au site seraient « exagérément disproportionnés » en comparaison avec tout bienfait supposé en lien avec le maintien de la prohibition générale de posséder des drogues. Par conséquent, la Cour a jugé que la ministre avait violé des droits constitutionnels des personnes qui consomment des drogues - les droits à la vie, à la liberté et à la sécurité de la personne -, et a ordonné à la ministre de renouveler l'exemption d'Insite.

Étant intervenu dans cette affaire phare, le Réseau juridique canadien VIH/sida s'est réjoui de cet important jugement fondé sur les droits et il espérait que celui-ci ouvrirait la voie à des services semblables dans d'autres communautés, aux quatre coins du pays. Hélas, trois ans plus tard, aucun nouveau service de consommation supervisée n'a vu le jour au pays.

Pire encore, le gouvernement fédéral a déposé le Projet de loi C-2, qui va à l'encontre de l'esprit (et du contenu) de ce qu'a affirmé la Cour suprême du Canada dans son jugement en faveur d'Insite.

Simplement dit, le Projet de loi C-2 compliquera la tâche aux autorités de santé et aux organismes communautaires désireux d'offrir des services de santé désespérément nécessaires aux membres de nos communautés qui consomment des drogues dans des circonstances peu sécuritaires et insalubres qui entraînent de plus grands risques de surdose ainsi que d'infection due à l'utilisation de matériel non stérile. Nous avons décrit ces réalités dans un nouveau document d'information préparé conjointement avec la Coalition canadienne des politiques sur les drogues. La semaine dernière, nous avons soumis ce document au comité de la Sécurité publique qui procède à l'étude du Projet de loi C-2, afin d'aider ses membres à comprendre comment ce projet de loi malavisé portera atteinte à la santé et aux droits humains des personnes qui font usage de drogue - et, de fait, sera dommageable également aux communautés qui bénéficieraient de tels services.

Démontrant une complète ignorance des bienfaits abondamment documentés des services de consommation supervisée, pour la santé et les communautés, le Projet de loi C-2 met l'accent sur des risques exagérés pour la « sécurité publique » et il perpétue la stigmatisation et la discrimination que rencontrent déjà les personnes qui consomment des drogues. De nombreux experts en santé publique et en droits humains partagent nos préoccupations et l'ont affirmé officiellement. Nous avons demandé que ce projet de loi entier soit abandonné.

Entre-temps, Insite continue de sauver des vies et il est un fleuron pour notre pays. Même en lien avec la nouvelle récente et tragique que 31 surdoses d'héroïne ont été signalées à Vancouver, le personnel d'Insite a réussi à éviter la mort de ces individus* en fournissant des soins et traitements immédiats. C'est un exemple de bonne nouvelle qui pourrait se répéter dans des communautés, à l'échelle du pays, si nous, comme pays, procédions à réellement revoir nos politiques de « guerre aux drogues », qui sont désuètes et mortelles.*

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